Architecte de formation, Charlotte Chebassier a choisi de faire évoluer sa carrière vers l’urbanisme et les sujets connexes à la ville - elle occupe aujourd’hui le poste de Business Developer au sein de Kisio, un cabinet de conseil tourné vers les solutions digitales et les services à la mobilité. Dans le cadre de son domaine d’expertise, Kisio réalise de nombreuses études de flux et des travaux de recherche, afin de comprendre comment transformer les sujets liés à la mobilité (sécurité, paiement, itinérance…).
Comprendre le point de vue voyageur, sa sensibilité, sa perception dans ses déplacements est un enjeu clé pour les acteurs de la mobilité. “Aujourd’hui on parle beaucoup d’insécurité dans les transports en commun”, explique Charlotte. “Notre démarche d’analyse permet de prendre en compte le vécu, la théorie, le quotidien, la perception… des utilisateurs, et de mesurer tous ces éléments par le biais de recherches et d’études.”
Récemment, Charlotte a contribué à la conduite et à la publication d’un rapport titré : Les millenials, voyageurs du paradoxe, une étude sur l’impact des nouvelles technologies sur la mobilité auprès des millenials. L’étude, qui se concentre sur trois grands axes de réflexion (les applications & les loisirs, l’usage du GPS et des algorithmes, et les nouveaux modes de transport), met en lumière les comportements de cette génération vis-à-vis de la mobilité.
“Nous avons décidé de mener cette enquête après avoir fait un constat fort”, explique Charlotte. “Aujourd’hui, nous observons de plus en plus de réseaux publics, collectivités, entreprises privées… tous désemparés sur les sujets de mobilité. Qu’il s’agisse de location de véhicules ou d’espaces de parking, de services liés au trafic… Tous ces acteurs avaient construit des modèles économiques solides, qui sont aujourd’hui menacés par un manque de clarté sur les nouvelles tendances de mobilité.”
Kisio a ainsi décidé de s’attarder sur les millenials, “une génération qui se déplace de manière autonome aujourd’hui, mais se comporte différemment des générations précédentes”, précise Charlotte. L’étude est menée sur deux fronts : d’une part, via une approche qualitative fondée sur un travail de recherche, et d’autre part, sur des analyses quantitatives s’appuyant sur une étude précédente, menée par le cabinet.
En introduction de l’étude, ses auteurs proposent un manifeste pour une mobilité vertueuse, qui appelle entre autres à adapter les politiques publiques, oeuvrer à plus d’inclusivité, orienter l’offre vers le loisir, casser les clichés… Un ensemble de défis essentiels à relever, pour trouver des solutions aux enjeux du moment.
“Aujourd’hui, le plus grand enjeu lié à la mobilité, est à la fois la notion de sécurité sanitaire, mais aussi celle de la sécurité physique. La baisse de fréquentation dans les transports publics a pour conséquence directe une sensation générale d’insécurité, qui va sûrement diriger beaucoup de choix dans les années à venir.”
La prédictibilité se distingue à son sens comme un autre enjeu fort pour le futur de la mobilité : “Jusque récemment, la plupart des gens suivaient une routine métro-boulot-dodo, on était capable d’avoir une vision de la mobilité et des déplacements faciles à prévoir. Aujourd’hui, les gens se déplaçant de plus en plus pour les loisirs, les motifs de déplacement sont différents et plus variés : on se déplace plus, plus souvent et de manière imprévue.”
En conséquence, le déploiement d’offres adaptées devient de plus en plus complexe, et met en danger le modèle économique de certains acteurs historiques du secteur.
Autre sujet au cœur des préoccupations des acteurs du tourisme : le développement rapide du MaaS (Mobility as a Service), qui ambitionne à créer une plateforme unique pour centraliser et gérer l’ensemble des mobilités de chaque utilisateur. Un idéal qui reste aujourd’hui complexe à mettre en place, mais vers lequel de nombreux acteurs du secteur cherchent à tendre.
Enfin, dernier challenge auquel sont confrontés désormais l’ensemble des acteurs du secteur : l’exigence et l’impatience croissantes des utilisateurs. “Autrefois, pour visiter une ville étrangère, on notait sur son carnet le numéro de l’agence, on imprimait ses plans, on passait du temps à tout planifier ! Aujourd'hui, on arrive sur place, on ouvre Google Maps ou Uber, on compare les prix et c’est parti !”, s’amuse Charlotte. Une situation complexe, qui demande aux prestataires d’offres et de services d’apprendre à arbitrer et à optimiser leurs services. “Il est intéressant de voir comment aujourd’hui les algorithmes sont entraînés pour répondre aux attentes des utilisateurs tout en les mitigeant”, analyse Charlotte.