Tourisme : comment faire vivre une destination la nuit ?

Tourisme : comment faire vivre une destination la nuit ?

Voici quelques pistes à explorer pour faire vivre votre destination de nuit. Mais aussi d’en faire un espace qui permette le dépaysement, sans sacrifier la sérénité de vos visiteurs ! Des conseils que l’on peut résumer en trois verbes : communiquer, spectaculariser et rassurer !

Le tourisme est intrinsèquement lié à la nuit. Ne définit-on pas les touristes comme des personnes qui passeront au moins une nuitée en dehors de leur domicile, que ce soit pour le plaisir ou les affaires ?

Le tourisme de nuit est, difficile de le nier, plutôt une affaire de plaisir. Mais il représente aussi, pour les destinations qui savent s’en saisir, une source de visibilité et de revenus additionnels. L'atmosphère de la nuit favorise d’autres formes de découverte, elle exacerbe la sensorialité et développe d’autres types de rapports sociaux. Mais parce que la notion de règle y est aussi moins stricte, plus floue, l’univers de la nuit nécessite que l’on pose un cadre propice aux touristes, comme aux riverains...

Voici quelques pistes à explorer pour faire vivre votre destination de nuit. Mais aussi d’en faire un espace qui permette le dépaysement, sans sacrifier la sérénité de vos visiteurs !

Des conseils que l’on peut résumer en trois verbes : communiquer, spectaculariser et rassurer !

Communiquer sur le tourisme de nuit

Pour prendre sa place dans le tourisme de nuit, il faut commencer par communiquer sur l’existant et les modalités d’accès : les visiteurs adeptes de virées nocturnes citadines veulent trouver des informations pratiques sur les meilleures adresses pour sortir et des conseils pour se déplacer une fois la nuit tombée.

Les réseaux sociaux ou le print se font le relais des informations utiles pour les voyageurs les plus jeunes. USE-IT, par exemple, est un réseau de cartes et d’informations “sans fioritures”. Créé par de jeunes locaux, pour la plupart bénévoles, on y trouve des informations gratuites et surtout pragmatiques : les clubs les moins chers, les bars à l’ambiance décontractée et un avertissement lorsqu’ils n’acceptent que le cash... Une idée à piquer : faire l’inventaire de son offre de nuit et communiquer dessus sans chichi (en n’oubliant pas de proposer une version internationale en anglais, voire en néerlandais) :

La carte Use-It 2021 de Lille

Côté smartphone, plusieurs initiatives ont été lancées : l’application The Bar Corner s’adresse aux oiseaux de nuit. Elle leur donne des conseils pour bien choisir son bar, en fonction de leurs préférences. Utilisez ces annuaires pour devenir visible auprès de votre cible. Idem pour Kraze et leur devise - “your home is your dance floor” -, qui répertoriait tous les clubs et restaurants par quartier... mais aussi les tabacs ouverts de nuit. Si ces applications semblent n’avoir pas trouvé leur public, c’est aussi parce que la communication autour des spots de sortie se fait désormais sur les réseaux sociaux, et organisée par tribu, comme l’explique Laurent Queige, directeur du pôle Divertissement du Welcome City Lab :

Le morcellement de la nuit est un phénomène accentué par les réseaux sociaux : si tu n’es pas sur le bon compte Facebook ou Instagram, tu n’as pas l’information. Les visiteurs en sont les premières victimes. Il y avait avant une presse qui permettait d’avoir une vision transversale de l’ensemble des opportunités. Aujourd’hui tout est digital, mais par tribu, on se regroupe par affinités.

L’immense enjeu des professionnels du tourisme, est donc d’intégrer ces circuits informels, mais aussi de recréer une communication globale qui profite à tous et ouvre les visiteurs à toutes les expériences de la nuit.

‘Spectaculariser’ le tourisme de nuit : au delà de la fête

Pour se positionner sur le tourisme nocturne, la clé est aussi d’investir dans des activités autres que la fête. La nuit est un temps charnière où convivialité, mystère, bienveillance se conjuguent pour rendre des moments banals plus inédits et spectaculaires. Certaines activités classiques prennent une couleur originale si elles se réalisent la nuit : randonnées, déambulations, visites de musée, installations de lumières...

Taïwan attire également les curieux avec son marché nocturne, où l’on peut faire ses courses de souvenirs insolites jusqu’à l’aube. Idem pour Singapour, qui organise son safari de nuit. Plus proche de nous, les musées français investiguent aussi la nuit : le Muséum d’histoire naturelle de Marseille propose une expérience de déambulation à la lampe torche parmi les animaux du musée.

© Nuit Blanche Paris

La Nuit Blanche à Paris d’octobre 2021 a mis à l’honneur la marche, avec notamment la participation de la Fédération Française de Randonnée qui a proposé des parcours “sportico-artistiques” sur le GR75. L’édition 2021 proposait également un trek sous forme de danse et des parcours thématiques en compagnie d’artistes. Une façon intrigante de (re)découvrir un territoire.

Faciliter la migration des oiseaux de nuit et équilibrer les relations entre riverains et noctambules

L’autre enjeu central du tourisme de nuit est celui des transports. Dans son premier plan stratégique pour le « nouveau tourisme de Barcelone », lancé en 2017, la capitale catalane a notamment travaillé sur les “transports doux”. Une stratégie qui repose sur la dilution des masses de touristes près des lieux d’intérêt, souvent situés en centre ville. Des horaires de métro de nuit mieux aménagés, mais aussi des bus nocturnes à destination des clubs plus excentrés sont autant de pistes à explorer pour faciliter l’accès aux bars et discothèques. Tout en s’assurant qu’ils ne soient pas concentrés dans les quartiers les plus résidentiels de la ville.

La nuit, c’est aussi un temps insoluble que chacun peut occuper dans le voyage en lui même :

Midnight Trains

Les mobilités douces ont le vent en poupe : la startup ferroviaire Midnight Trains œuvre à réenchanter les trains de nuit. Elle y offre le confort d’un hôtel, avec la sécurité en plus. Les touristes peuvent en effet profiter d’une chambre individuelle, et non plus partager leur wagon-lit avec des inconnus.

Pour se positionner comme une destination accueillante pour les noctambules, les institutions comme les professionnels du tourisme doivent également rassurer leurs habitants et coordonner le balai des acteurs concernés.

En France et ailleurs, on a ainsi vu apparaître la figure des maires de la nuit. Ces derniers sont chargés de rassurer les acteurs du tourisme quant à la gestion de la vie nocturne. Cette initiative a ainsi permis de corriger des erreurs tactiques commises par certaines villes. Par exemple, celle de fermer les clubs à la même heure, provoquant une descente bruyante de fêtards dans les rues. Résultat, le club flottant Concrete a récemment obtenu sa licence lui permettant d’opérer 24 heures sur 24.

À Paris toujours, l’adjoint de la nuit Frédéric Hocquard a créé un jury pour valider les nouveaux espaces festifs. La ville met même à la disposition des noctambules des lieux appartenant à la mairie, notamment dans les sous-sols.

Le mot de la fin

Se positionner sur le tourisme de nuit implique nécessairement de dépoussiérer la vision uniquement festive que l’on peut se faire des noctambules. En proposant des attractions et activités variées, qui s'adressent à tous, les destinations pourront éviter les impasses des nuisances sonores et autres incivilités. C’est aussi l’occasion de créer une stratégie plus viable sur le long terme.

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